Nous entendons parfois parler, dans nos couloirs ou en réunion d’information, de Microfluidics, ou de Microfluidique. Mais savons-nous tous de quoi il retourne ? Probablement pas. En tout cas, ce n’était pas le cas de l’auteur de ces lignes avant d’attaquer la rédaction de cet article ! Arrêtons-nous donc sur ce domaine passionnant, à la fois éloigné de notre univers d’électroniciens et en même temps si proche !
De quoi s’agit-il ?
D’abord, direction Wikipédia, qui nous dit la chose suivante : « la microfluidique est la science et la technique des systèmes manipulant des fluides et dont au moins l’une des dimensions caractéristiques est de l’ordre du micromètre ». Ok, très bien, mais alors ? Un peu plus loin, il est précisé qu’il s’agit de microsystèmes permettant la circulation de fluides de tout types et que l’échelle microscopique mise en oeuvre par ce biais permet des usages impossibles ou trop complexes à l’échelle macroscopique.
Les systèmes microfluidiques sont composés d’éléments de base et de fonctions multiples : des canaux pour les écoulements, des mélangeurs, des pompes, des valves, des interfaces, des trieurs, des séparateurs… En gros, ce sont les éléments classiques que l’on retrouve en plomberie, avec des tuyaux, des vannes, des échangeurs, des manomètres, mais à une échelle extrêmement réduite, non-perceptible à l’œil : un « tuyau » microfluidique a un diamètre utile de quelques µm, comparable à celui d’un cheveu !
Grâce à ces « briques » de base, il est possible de concevoir des applications complexes dans des domaines tels que les analyses chimiques avec de plus grandes sensibilités et précisions.
Qu’est-ce que la chromatographie ?
Intéressons-nous en particulier à l’un des champs de la microfluidique : les canaux (« channels » en anglais).
Les canaux sont des circuits de circulation qui proposent aux liquides étudiés un rapport surface/volume très conséquent : la surface développée rencontrée par le liquide est très grande par rapport au volume de ce même liquide. La surface développée est obtenue grâce à plusieurs éléments : les canaux sont organisés en serpentins (l’ensemble est appelé « separation bed ») et les canaux sont eux-mêmes peuplés de piliers que les composants du liquide doivent en permanence contourner.
Ce parcours alambiqué permet la séparation des molécules du liquide introduit, molécules qui ont un chemin plus ou moins rapide au travers des canaux. La chromatographie permet l’analyse des molécules composant le liquide en fonction de leur réponse à une lumière.
Encore une histoire de piliers ?
Eh oui ! Si la microfluidique nous intéresse chez Murata Caen, ou du moins, si des entreprises du domaine sont motivées à collaborer avec nous, c’est bien parce qu’il est question de piliers ! Un bon système microfluidique doit offrir une structure de piliers la plus régulière possible et ce dans un matériau qui n’interagit pas avec les liquides étudiés. De plus, pour augmenter la surface développée, les acteurs du marche recherchent des piliers avec un diamètre et un pitch de plus en plus petits et des profondeurs de plus en plus grande. Ça ne vous rappelle pas les générations 1, 2, 3 et 4 du PICS (pas la 5ème, qui elle, a une structure aléatoire) ?
La production des systèmes microfluidiques est très proche de la production de nos condensateurs : les étapes de gravure sèche et de gravure humide sont les mêmes, mais il n’y a aucune étape de diffusion.
Et que vient faire Murata Caen dans la Microfluidique ?
Maintenant que nous savons que la microfluidique s’intéresse à des structures en piliers, régulières, de très petites tailles et que le Silicium est un excellent candidat, il est normal que Murata Caen joue un rôle dans cet univers ! En microfluidique, on parle d’ailleurs de « laboratoire du puce », ou encore de « chips ».
L’histoire entre notre site et la microfluidique a commencé il y a une dizaine d’années avec un premier client qui vendait des membranes pour le filtrage de bactéries pour la bière et le lait. Depuis 2017, un second partenariat a vu le jour avec la société Pharma Fluidics. Cette société belge développe et commercialise des systèmes microfluidiques destinés à l’analyse chromatographique en laboratoire, par exemple pour déterminer des compositions moléculaires (protéines, lipides…).
Juste une opportunité ?
Au-delà de l’opportunité business (environ un million d’euros de chiffre d’affaires annuel), travailler sur la microfluidique à Caen permet aussi de renforcer certains aspects stratégiques de notre savoir-faire local : les contraintes imposées par ce type de production en matière de gravure profonde, de régularité et de reproductibilité des motifs gravés font aussi progresser la qualité de fabrication de nos technologies PICS.
Par exemple, la lutte contre le « sticking » (effondrement des piliers), ou encore la finesse dans l’alignement des motifs (un produit microfluidique couvre une grande surface d’un wafer et la gravure du motif des canaux est réalisée en plusieurs étapes grâce à un stapper) sont des challenges qui concernent directement la production de capacités en PICS.
Il existe d’autres enjeux, qui concernent cette fois-ci notre proposition de valeur dans ce domaine. Aujourd’hui, les produits microfluidiques sont livrés sous forme de wafers à notre client, wafers qui nécessitent encore trois étapes de production : l’anodisation (rendre le Silicium poreux), le bonding (coller une plaque de verre sur le wafer, afin de fermer les canaux et de permettre la chromatographie) et enfin le sciage de l’ensemble.
Un premier enjeu consiste à maîtriser l’ensemble de la chaîne de production y compris ces trois dernières étapes, réalisées aujourd’hui hors de nos murs.
Un autre enjeu réside dans le contrôle qualité des produits microfluidiques. Autant nous pouvons mesurer les paramètres électriques d’une capacité, autant un canal de séparation microfluidique est inerte et ne peut être contrôlé que visuellement !
D’autres challenges comme le diamètre des wafers utilisés, ou encore la production d’autres briques microfluidiques s’ajoutent pour faire de ce sujet un domaine d’innovations possibles à venir.






